Écrite par un homme singulier, penseur, poète, écrivain et artiste-peintre Mauricien, cette affirmation des années soixante montre qu’il y a une Ile Maurice d’apparence et une de réalité. L’apparence c’est la beauté naturelle des paysages et la gentillesse des habitants mais il y a le revers de la carte postale qui n’est pas forcement sombre et qu’il ne s’agit pas d’occulter mais au contraire, de découvrir et accepter car c’est cet ensemble qui fait l’identité de l’Ile Maurice.
La Canne-à-sucre est le fil d’Ariane reliant les Mauriciens ainsi que tous les pans de leur histoire. Cette industrie est responsable autant de la douceur de vivre palpable que de l’arrière goût amer, plus subtil, que l’on peut découvrir à condition de sortir des hôtels. La Canne-à-sucre explique les différents milieux d’une même population, le tissu social d’une nation en devenir, la coexistence de plusieurs langues comme l’architecture insolite des villes et villages, la vulnérabilité environnementale en passant par la sinuosité des routes ; autant d’aspects qui rendent cette île « unique », qualificatif qui lui sied mieux que le « paradisiaque » des brochures.
Qu’est-ce qui rend l’Ile Maurice si attachante? Si cette question pourrait générer bien des réponses différentes, ce n’est pas tant par le fait qu’elle a beaucoup d’atouts que par la difficulté à mettre « le doigt dessus ». C’est bien un ensemble de choses qui font revenir nos touristes, année après année, malgré une transformation rapide des paysages par endroits. Les réponses ne sont pas toutes d’ordre concret et physique mais elles ont droit de cité.
Si au siècle dernier l’Ile Maurice n’était qu’une destination d’hôtellerie de plage, elle s’est depuis transformée en véritable destination touristique. Il y a bien des choses à faire à l’Ile Maurice, non-seulement pour son éventail d’activités mais aussi des flâneries qui peuvent procurer de bons moments ou apporter leur lot de découvertes.
Il y a la facilité d’organiser son séjour et l’impression que tout est possible, facilement adaptable et modulable aux souhaits des uns et des autres. L’indolence de la mer le long des plages sous-le-vent et surtout l’absence quasi-totale de dangers naturels comptent pour beaucoup ; pas de reptiles venimeux, de grands prédateurs, sur terre comme en mer. Pourvu que ça dure !
Il y a sa richesse en couleurs qui répare et restaure un véritable chasse-spleen pour ceux qui viennent du profond de leur hiver. Les innombrables teintes Turquoises des lagons superposés par le bleu profond de l’océan souligné du blanc de la barrière de corail. Côté terre, ses champs de cannes vallonnés tranchant parfois avec le rouge-orangé de la terre, ponctué des pyramides de pierres. Lors que la canne est en fleur les champs semblent être survolés d’un drap léger, qui ne demande qu’à emprunter les teintes de ces soleils couchants flamboyants, qui sont chaque jour différents. En parlant de Flamboyants… ces arbres majestueux qui méritent la majuscule à leur nom. Au mois de décembre, ce sont de grands dômes rouges, parfois plus orangés, qui contrastent avec le vert des champs et avec un peu de chance, le jaune vif des Casses.
Bien sûr d’autres sens sont sollicités. Les douces températures tempérées des demi-saisons ou de l’hiver, harmonisant la chaleur intense du soleil et la fraîche brise du large ; l’odeur d’iode des écumes de mer sur la côte est et le chant des nombreux oiseaux tout comme le brouhaha lointain des vagues. Tout ceci n’est perceptible que dans des régions tranquilles, loin des buffets et orchestres d’hôtels.
Et que dire des levers de lune magiques ou de ces ciels étoilés, visibles lors que loin des projecteurs. Une fois constatée cette voûte céleste nous donne cette dimension contradictoire de l’isolement et du rapprochement ; considération innée chez nous îliens, que l’éloignement du reste du monde tracasse et rassure à la fois.
C’est d’ailleurs cet éloignement qui donne au Mauricien cette vénération pour tout ce qui vient d’ailleurs ; les objets importés comme nos touristes. Un avion ou un bateau reste, dans la mémoire profonde du Mauricien, un instrument de surprise et d’espérance, un événement heureux, briseur de routine. Cet éloignement donne au Mauricien ce sens de l’accueil et cette gentillesse si souvent citée par des visiteurs touchés.
Historiquement, c’est l’hôtellerie qui a su prendre un bon départ en offrant une qualité qui s’explique mieux par ce qui précède que par le pur professionnalisme. Ces hôtels à forte identité Mauricienne car imprégnée de cette dimension humaine ont charmé, et leurs sites hors du commun ont permis de belles couvertures de magazines. Si l’identité s’est diluée, les standards ont suivi les courants ascendants. La qualité de l’hôtellerie en elle seule est une des causes de la fidélité de nos visiteurs.